Les heures légales et universelles représentent une convention artificiellement décidée par l’Homme. Elles ne correspondent exactement au temps astronomique que quelques jours par année. Explications.
TEXTE | Geneviève Ruiz
Une journée dure vingt-quatre heures. C’est ce que l’on croit, habituellement. Pourtant, ce n’est le cas que quatre fois par an: le 15 avril, le 14 juin, le 1er septembre et le 24 décembre exactement. Le reste de l’année, l’intervalle entre deux passages du Soleil au point culminant dans le ciel (soit midi) prend tantôt moins, tantôt plus de temps que vingt-quatre heures. Il s’agit d’un décalage qui, certes, n’excède jamais plus de seize minutes. Mais il est suffisant pour que les cadrans solaires le reflètent et pour que les horlogers s’y intéressent.
«La division d’une journée en 24 unités est culturelle et, en quelque sorte, arbitraire, observe Jean-Daniel Lüthi, responsable du laboratoire d’ingénierie horlogère de la Haute École Arc Ingénierie de Neuchâtel. Il a bien fallu effectuer un choix pour organiser la société. Lorsqu’on dit qu’une journée dure vingt-quatre heures, il s’agit du temps solaire moyen. Il n’équivaut pratiquement jamais au temps solaire réel ou astronomique, qui varie dans le courant de l’année.»
Lois de Kepler et inclinaison orbitale
Pourquoi le Soleil prend-il parfois plus ou parfois moins de vingt-quatre heures pour repasser au zénith? Il y a deux raisons à cela. La première est en lien avec les lois de Kepler1L’astronome allemand Johannes Kepler (1571-1630) est célèbre pour avoir notamment découvert que les planètes effectuent une trajectoire elliptique et non pas circulaire en tournant autour du Soleil. Il a également découvert les relations mathématiques qui régissent leurs mouvements sur leurs orbites.: selon elles, l’orbite de la Terre est une ellipse dont le Soleil ne se trouve pas au centre. Et notre planète ne parcourt pas cette orbite à une vitesse constante. La seconde est que l’axe de rotation de la Terre est incliné sur son orbite.
«Comme ces facteurs sont quasi immuables dans le temps, il existe un paramètre correcteur nommé ‹équation du temps›, qui permet de calculer la différence entre le temps solaire moyen et astronomique, explique Jean-Daniel Lüthi. À noter qu’il ne s’agit pas d’une équation à proprement parler: en astronomie ancienne, le terme ‹équation› était utilisé pour désigner une correction ajoutée à une valeur moyenne afin d’obtenir une valeur vraie.» L’équation du temps peut se calculer précisément selon une formule, mais il est aussi possible de l’obtenir grâce à des tables détaillées dans les éphémérides astronomiques.
On peut notamment y constater que si le jour le plus court de l’année correspond bien au solstice d’hiver le 21 décembre, le Soleil se couche le plus tôt le 13 décembre et se lève le plus tard le 3 janvier. Le même type de décalage peut être observé aux alentours du solstice d’été.
Des montres intègrent l’équation du temps
Dès le XVIIe siècle, certaines montres à grandes complications ont intégré l’équation du temps. Ce savoir-faire est d’ailleurs toujours enseigné dans les écoles de haute horlogerie. À quoi cela sert-il de connaître le temps solaire vrai? «Pas à grand-chose pour le commun des mortels, résume Jean-Daniel Lüthi. Autrefois, les navigateurs s’en servaient pour déterminer leur position exacte. Actuellement, il s’agit d’un raffinement pour des collectionneurs ou des passionnés. Il est souvent proposé conjointement à d’autres accessoires comme le quantième perpétuel ou les phases de la lune.»