TEXTE | Geneviève Ruiz
IMAGES | Gregg Segal
«Déjà enfant, j’étais fasciné par la quantité de déchets que produisaient mes voisins de l’autre côté de la rue», raconte le photographe américain Gregg Segal. «Je me demandais où ils allaient et ce que deviendrait notre monde une fois qu’il n’y aurait plus assez de place pour cet immense volume.» Avec son travail 7 jours d’ordures mené entre 2013 et 2015, ce quinquagénaire basé dans les environs de Los Angeles a souhaité visibiliser cette problématique. Mais pas n’importe comment.
«J’ai voulu créer des mises en scène qui interpellent.» Le photographe a demandé à des amis ou des voisins de poser pour lui et s’est même photographié avec sa famille. Chaque ménage devait conserver ses déchets durant sept jours. Gregg Segal choisissait ensuite un fond, toujours issu de la nature, sur lequel les disposer: sable, herbe, neige, etc. «J’ai voulu que le contraste entre ces éléments naturels et les ordures soit choquant. C’est aussi une manière de montrer que les déchets font partie de la nature et de nous-mêmes.»
«Les personnes étaient courageuses de participer à mon shooting. Certaines ont d’ailleurs refusé. Poser avec ses déchets peut avoir quelque chose d’humiliant. Cela nous met à nu. Les ordures sont sales et révèlent l’envers de notre société de consommation clinquante, de même que la démesure avec laquelle nous satisfaisons nos besoins.» Militant, le travail de Gregg Segal ne souhaite néanmoins pointer personne du doigt. «Ce projet a pour but de sensibiliser le public aux déchets que notre société produit. J’ai constaté avec intérêt qu’il a eu davantage de succès en Europe qu’aux États-Unis. Probablement en raison de notre culture libertaire, à laquelle le problème des déchets est lié. Ici, les gens n’acceptent pas qu’on leur dise comment se comporter ou consommer.»