Portfolio - Le destin tragique de la plus ancienne banque de graines

Portfolio – Le destin tragique de la plus ancienne banque de graines

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Le travail de Mario Del Curto sur l’institut Vavilov intitulé «Graines du monde» marque le début d’une longue quête sur les liens entre humanité et monde végétal.

TEXTE | Geneviève Ruiz
IMAGES | Mario Del Curto

Le photographe vaudois Mario Del Curto a passé quatre ans à photographier le travail des collaborateurs de l’institut Vavilov en Russie. Situé à Saint-Pétersbourg et comprenant 12 stations disséminées sur le territoire russe, cette banque de graines créée en 1894 est la plus ancienne du monde. Elle porte aujourd’hui le nom du botaniste de génie Nikolaï Vavilov (1887-1943), qui l’a dirigée de 1920 à 1940, année de son arrestation par le gouvernement stalinien. Le scientifique mourra de faim en prison trois ans plus tard.

Persuadé que seule la biodiversité était en mesure de sauver son pays de la famine, Nikolaï Vavilov a rassemblé une immense collection de semences, avec un enthousiasme sans commune mesure. Il a pris part à une centaine de missions de collectes dans 64 pays, dont il a rapporté 50’000 variétés de blé, 25’000 d’orge ou 4500 de pomme de terre. Lorsque Mario Del Curto découvre le travail de ce botaniste au destin tragique, l’institut est menacé par un projet immobilier. Il décide alors de se rendre sur place pour témoigner de la richesse de cet inestimable patrimoine.

«La vie et le projet de Nikolaï Vavilov m’ont beaucoup touché. J’ai aussi été marqué par les conditions de travail des collaborateurs actuels de l’institut, qui sont sous-payés et ne comptent pas les heures passées dans ces bâtiments délabrés. Leur dévouement et leur rigueur scientifique sont identiques à ceux de leur illustre prédécesseur. Ils se sentent investis de la mission d’assurer la sécurité alimentaire de l’humanité. Certains d’entre eux ont plus de 80 ans.» Le photographe a été frappé par la vulnérabilité de cet institut et le peu d’importance qu’il lui est accordée sur le plan international, alors qu’il possède des milliers de graines qui n’existent nulle part ailleurs.

Le travail de Mario Del Curto sur l’institut Vavilov, intitulé «Graines du monde», représente le début d’une longue quête sur les liens qui unissent l’humanité et le monde végétal. Elle l’a amenée à photographier des jardins suspendus à Singapour, un paysan cultivant 380 variétés de pomme de terre dans les montagnes péruviennes, ou des forêts de pommiers sauvages au Kazakhstan.


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